Et si vous aviez un trésor dans votre grenier ? Rencontre avec Pierre-Alain Le Brech, commissaire-priseur

Au même titre qu’un notaire, le métier de commissaire-priseur est relativement mal connu des particuliers. Nous avons donc souhaité évoquer avec Pierre-Alain Le Brech, commissaire-priseur à Paris et partenaire de De La Cour Au Jardin, les spécificités d’une profession qui inventorie, expertise et vend des pièces de mobiliers et autres objets d’arts. Une activité dont les particuliers sont bien moins éloignés qu’ils ne le pensent. 

Qui êtes-vous Pierre-Alain, d’où venez-vous et surtout comment vous êtes-vous dirigé vers le métier de commissaire-priseur ? 

Pierre-Alain Le Brech : Même si je ne suis pas parisien d’origine, j’ai toujours vécu à Paris et je suis commissaire-priseur depuis 2002. Alors, je ne suis absolument pas issu d’une famille de commissaires-priseurs ou d’antiquaires mais mes parents m’ont toujours « traîné » aux puces ou dans des brocantes. Ma mère m’emmenait également voir des expositions ce qui a aiguisé mon goût pour l’art. Et puis j’ai fait un parcours classique de droit et à l’heure où je devais décider de mon orientation professionnelle, je me suis dit : « Pourquoi ne pas combiner mes deux passions ? ». Je me suis alors inscrit à l’École du Louvre en parallèle de ma licence de droit et puis j’ai préparé l’examen de commissaire-priseur !

On connaît effectivement les ventes aux enchères, les ventes publiques, mais quel est votre rôle et quelles sont vos prérogatives ? 

Pierre-Alain Le Brech : Effectivement, nous avons un spectre un peu plus large que cette image à laquelle nous sommes rattachés. Nous travaillons en étroite collaboration avec les notaires puisqu’ils nous appellent pour faire des inventaires fiscaux dans le cadre de successions par exemple. C’est d’ailleurs une activité très complémentaire de la nôtre puisque quand le notaire estime les murs, nous estimons ce qu’il y a dans les murs. Nous allons donc procéder à un inventaire, à une expertise des biens meubles d’un particulier et, le cas échéant, organiser la vente de ces biens et officier les enchères. Et puis nous avons également une mission de conseil. Pour la vente, bien entendu, mais également pour l’achat. 

Est-ce que vous avez une spécialité ou une appétence particulière pour telle ou telle période, ou tel ou tel objet ?

Pierre-Alain Le Brech : Chaque commissaire-priseur est, par nature, généraliste. Après c’est vrai que je suis un peu plus spécialisé sur les bijoux, les bijoux couture et la mode. Mais je reste généraliste et j’accepte tous les dossiers. Après, si on tombe sur objet vraiment très pointu comme une sculpture africaine par exemple, on peut travailler en collaboration avec un confrère expert du sujet.

Aujourd’hui les ventes aux enchères se sont largement démocratisées. Avec toutes les émissions spécialisées qui fleurissent à la télévision, chacun rêve de trouver un trésor caché dans son grenier… Est-ce que, en dehors du cadre des successions, vous êtes appelé par des particuliers pour expertiser leurs biens ? 

Pierre-Alain Le Brech : Bien sûr ! On le fait régulièrement.Ça peut être dans le cas d’un déménagement, d’une séparation ou c’est simplement la volonté de connaître la valeur d’un objet. Dans ce cas, nous faisons ce que nous appelons un inventaire descriptif et estimatif, soit la désignation des objets et leur estimation. Petite précision, l’estimation sert à la vente mais également pour les assurances. Une estimation ne débouche donc pas automatiquement sur une vente aux enchères.

C’est-à-dire que, dans le cas d’un sinistre, on peut faire appel à un commissaire-priseur pour obtenir une attestation d’avis de valeur de nos biens ? 

Pierre-Alain Le Brech : Absolument. Nous fournissons une expertise écrite, dûment signée et tamponnée que le client pourra transmettre à son assurance. Dans ce cas précis, nous indiquons une valeur plus importante que la valeur de vente publique puisque l’on considère que la valeur d’assurance, c’est la valeur à laquelle vous devriez acheter le même objet dans le commerce, chez un antiquaire ou un galeriste par exemple. A contrario, les estimations destinées au second marché, celui de la vente publique, sont généralement un peu plus basses. Les enchères, rattrapant ou non l’écart.

Est-ce qu’il vous est déjà arrivé de tomber sur une pépite chez un particulier lors d’une de vos visites ? 

Pierre-Alain Le Brech : Bien sûr, ça arrive tout le temps ! C’est justement l’intérêt et le côté excitant de notre profession. Quand vous allez à un rendez-vous, vous ne savez pas ce que vous allez trouver derrière la porte. Et l’adresse ne laisse présupposer de rien. Vous pouvez avoir une bonne adresse dans un bon quartier et vous n’y trouverez rien de grande valeur. Et puis vous pouvez avoir une adresse totalement improbable et y découvrir des choses auxquelles vous ne vous attendiez pas. C’est tout l’attrait de cette profession.

Un exemple à partager ? 

Pierre-Alain Le Brech : Un jour, dans une résidence année 1980 très moyenne gamme située rue de Reuilly, j’ai trouvé un très joli ensemble de mobilier art déco signé Marc Du Plantier. On a fait une très belle vente par la suite. 

Et est-ce que vous avez déjà eu un coup de cœur pour un objet au point de vouloir l’acheter ? 

Pierre-Alain Le Brech : C’est impossible, on ne peut pas acheter dans nos ventes. On ne peut pas être juge et partie. Nous sommes là pour défendre notre vendeur et obtenir le prix le plus élevé possible pour un objet. En revanche, c’est vrai que quand on commence ce métier, on a envie de tout acheter, c’est la frustration permanente ! (rires)

Vous êtes amené à rencontrer beaucoup de personnes lors de vos visites. Est-ce que vous avez tiré un enseignement particulier de toutes ces rencontres ? 

Pierre-Alain Le Brech : Parfois, les gens ne donnent pas de valeur à des choses qui peuvent en avoir une très grande et inversement, une grande valeur à des choses qui n’en ont pas vraiment. C’est évidemment la part de l’affect qui n’est pas quantifiable. C’est pour ça que je dis toujours à mes clients de ne rien jeter avant que je vienne. Je vais faire le tri avec eux. 

Une fois que vous êtes venu expertiser et conseiller votre client, comment organise-t-on une vente aux enchères pour un particulier ? 

Pierre-Alain Le Brech : Eh bien, après l’estimation, nous nous chargeons des photos, des transports éventuels… de toute la logistique finalement. On apporte un service clé en main si vous voulez. Et puis si les gens veulent faire place nette, dans le cas d’une vente par exemple, on a également un réseau de personnes en charge du débarras de tout ce qui n’est pas vendable. 

Vous vous déplacez partout en France ?

Pierre-Alain Le Brech : Oui partout en France. J’organise même des ventes sur place, directement dans les maisons. Cela évite aux clients d’avoir à débourser des coûts de transports importants pour acheminer leurs objets dans une salle de vente et puis c’est particulièrement convivial. Récemment, j’ai monté une vente aux enchères dans une jolie propriété du Sud-Ouest qui était bourrée à craquer. On a fait une publicité dans le journal local, il faisait un temps de rêve et tous les marchands des environs, tous les locaux et les estivants du coin sont venus. On a fait des prix qu’on aurait sûrement pas fait si on avait tout rapatrié dans une salle de vente. Et l’avantage c’est que vous pouvez tout vendre dans ces cas-là. Les arrosoirs, la tondeuse à gazon, les bibelots, les outils… tout y passe !

Pierre-Alain, avant de conclure notre interview, nous souhaiterions vous poser notre question fétiche : quelle est votre définition de l’art de vivre ?

Pierre-Alain Le Brech : L’art de vivre c’est beaucoup de choses. C’est le voyage, les rencontres… mais c’est aussi le confort de son foyer. Ce qu’on y met, les objets dont on s’entoure et avec lesquels on se sent bien.